Le gouverneur de la Ville de Kinshasa Gentiny Ngobila a fermé le marché central de Kinshasa pour réhabilitation et assainissements. Cet espace commercial le plus fréquenté de la capitale demeure insalubre depuis de longues années. L’assainissement quotidien ne s’y déroule pas et de tas d’immondices jonchent ses grands couloirs depuis de nombreuses années. Sur terrain, Lemag.cd a constaté que seul le cœur de ce marché constitué des pavillons et magasins est effectivement fermé. Les commerces situés en dehors de cet espace continuent en revanche de fonctionner normalement.
Sur l’avenue Bokassa, les deux montagnes d’immondices qui s’y trouvaient n’existent plus. Elles ont été évacuées et la route est dégagée. Les passants ne se bouchent plus les nez comme ils faisaient avant pour éviter les mauvaises odeurs. Les activités se déroulent normalement. Juste à côté, sur Rwakadingi, une barrière de la Police est installée. Cette avenue qui abritait de nombreux étalages est fermée aux commerçants, pour assainissements mais tous les magasins sont ouverts. Toutes les tables érigées sur la chaussée ont été détruites. L’espace est encore sale, on peut apercevoir beaucoup de sortes de déchets sur la chaussée. Quelques petits commerçants ayant bravé la barrière de la Police continuent de vendre épices, légumes, produits laitiers et tant d’autres.
Tout le monde est en alerte, prêt à prendre sa marchandise et détaler à chaque fois que le véhicule de la patrouille arrive. La tension est palpable, humeur ambivalente. Tant la gentillesse est adoptée pour séduire un client, le stress et la colère ne sont pas loin à la venue de la Police. « Depuis qu’ils ont fermé rien n’a encore été fait, nous continuerons à venir tous les jours pour vendre afin de nous en sortir », crie fort un vendeur des babouches.
La présence des agents de l’ordre est très remarquable. Quatre véhicules 4X4 de la Police et Police Militaire se relaient pour chasser de récalcitrants. Toujours sur Rwakadingi à la sortie vers Kasa-Vubu, les agents de l’ordre ont surpris quelques vendeurs ayant étalé leurs affaires alors que c’est interdit. Ils arrachent leurs marchandises et les mettent dans leurs véhicules. Les commerçants essaient de les en empêcher, les esprits s’échauffent, la Police Militaire observe de loin la scène. Les agents de l’ordre réussissent à ramener les marchandises dans leurs Pickup sous les sifflets de tous les autres. « Ils vont devoir passer sur nos cadavres, ce marché n’appartient pas à Ngobila, c’est le président Mobutu qui nous l’a légué. Vous vous fatiguerez de nous chasser parce que nous allons de nouveau étaler », vocifère Nathalie, jeune vendeuse des accessoires de beauté pour femmes à qui la Police a confisqué une partie de la marchandise.
Sur l’avenue de l’Ecole, elle aussi fermée pour assainissements, les étalages ont été détruits. Là, des tonnes d’immondices en train de brûler sont encore visibles. Les magasins également ouverts mais beaucoup pensent que c’est injuste ce qui se passe au grand marché : « On a cassé ma table où je vends mes vêtements. Durant trois jours maintenant je viens ici dans l’espoir de pouvoir reprendre. Pourquoi on doit chasser nous autres mais pas les autres, beaucoup de ces magasins sont tenus par des étrangers. Ils ont plus droit à ce marché que nous-mêmes les Congolais ? », se questionne cette vendeuse désespérée, assise devant la boutique d’un commerçant libanais.
Cette fermeture partielle est aussi observable sur une partie de l’avenue du Marais où les étalages en bois et tôles qui s’y trouvaient ont subi le même sort que celui des autres avenues fermées. C’est au cœur de ces grandes avenues que se trouvent de grands pavillons du marché central qui feront l’objet de réhabilitation et assainissements. Les activités se déroulent normalement dans les autres coins du marché comme Kasaï, Itaga, Kato, Luvua, Commerce ou encore l’avenue du Marché.
D’après le gouverneur de la ville, les commerçants reprendront leurs activités jusqu’à la fin des travaux. Il les invite par ailleurs à se rendre dans les marchés provisoires créés pour les accueillir. Les tables y sont données gratuitement, indique le gouverneur. Les commerçants ne veulent pas s’y rendre de peur de ne plus y retourner. Ils accusent le gouverneur d’avoir des intentions cachées. Il chercherait, selon eux, à vendre cet espace aux expatriés.